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Le décollage se rapproche à grands pas. Fin 2022, un roulier d’un nouveau genre de 121 mètres de long, équipé d’ailes rigides dont la technologie vient tout droit de la Coupe de l’America, mettra les voiles pour traverser l’Atlantique et livrer le lanceur de la fusée Ariane 6 à Kourou, en Guyane. Nils Joyeux, jeune officier, à l’origine du projet Canopée de Zéphir & Borée qui fait le pari de la propulsion éolienne couplée à une motorisation GNL, nous raconte cette aventure qui impulse un vrai élan dans la course à la décarbonation.

 

Comment est né ce projet de cargo à voile ?

« Cette envie remonte à 2015, dans le cadre d’un mémoire d’études que nous avons mené à l’école de la marine marchande de Nantes. Nous sommes quatre co-fondateurs de Zéphyr & Borée, dont deux jeunes officiers. On a travaillé sur plusieurs projets et en 2018 on a répondu à l’appel d’offres pour le transport du lanceur d’Ariane 6. On s’est associé avec une autre compagnie maritime Jifmar Offshore Service avec laquelle on a créé une joint-venture, une compagnie maritime commune nommée Alizés qui exploite ce « liner » Ariane.   ZB canopee 1 copie


Pour ce projet, on a fait une rencontre déterminante, celle de Marc Van Peteghem, l’un des deux fondateurs du cabinet d’architecture naval (VPLP) qui a développé une aile rigide et qui avait envie d’adapter ce concept au monde de shipping. Il a conçu l’Oceanwings®, un système plus simple, plus robuste et complètement automatisé. » 

 

Quels sont vos objectifs en termes de décarbonation ?

« On part du principe que même si on ne peut pas tout le temps compter sur le vent qui reste une énergie aléatoire, on peut néanmoins l’utiliser pour diminuer de 20-30 ou 40%, parfois beaucoup plus la consommation en fuel lourd des bateaux. Pour les besoins d’Ariane qui fait une dizaine de lancements de fusée par an, Canopée fera une dizaine de traversées par an. En complément de la propulsion vélique, le navire sera équipé de moteurs Diesel/GNL permettant de réduire les émissions polluantes du navire (particules fines, dioxyde de soufre, etc). Pour répondre à ses objectifs commerciaux, il tiendra des moyennes de l’ordre de 16 nœuds. »

Le retour de la marine à voile, c’est donc une vraie solution d’avenir et c’est pour demain ?

« Il y a cinq ans, quand on parlait de transport à la voile, on était vraiment pris pour des fous ou des doux rêveurs. Aujourd’hui, ce contrat avec Ariane nous permet de donner le vrai coup d’envoi de la propulsion éolienne dans le shipping. C’est vraiment très encourageant qu’un groupe de cette ampleur ait le courage de permettre le lancement du premier cargo à voile moderne. Derrière, j’ai bon espoir que cela encourage d’autres projets, comme celui de Neoline par exemple. Depuis le début, notre crédo c’est d’utiliser le vent et la propulsion éolienne, avec l’envie de nous inscrire dans une démarche industrielle. L’énergie du vent reste une énergie très puissante, qu’on a utilisée pendant des milliers années et qu’on utilisait encore il y a cent ans. C’est pour nous une des solutions les plus concrètes, efficaces, et matures parmi les alternatives au fuel. Le bateau sera lancé fin 2022, la construction vient de commencer. Nous avons contractualisé avec un chantier néerlandais qui sous-traite la construction en Pologne, qui sera ensuite finalisée au Pays-Bas. Le navire fera alors le tour de plusieurs ports européens pour aller récupérer des éléments de la fusée, puis il traversera l’Atlantique pour rejoindre la Guyane. »